Alexis Clairaut (1713-1765)

Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765)


29 avril 1733 (1) : Clairaut vote :
Les mechaniciens pensionnaires et associez ayant proposé selon la forme ordinaire M[essieu]rs Meynier, Fontaines et l'abbé Sauveur pour la place vacante d'adjoint mechanicien, la compagnie a choisi les deux premiers pour être proposez au Roy (PV 1733, f. 83r).

Gallica

Fontaine (29 ans), qui avait déjà été proposé pour la place de pensionnaire géomètre (cf. 11 mars 1733 (1)), et pour la place d'associé mécanicien (cf. 24 mars 1733 (1) et 28 mars 1733 (1)), n'apparaît qu'en deuxième position sur la liste des postulants, mais l'usage qui consiste à ce que le Roi choisisse le premier nom de la liste ne sera pas suivi cette fois, et Fontaine sera académicien le 11 mai (cf. 13 mai 1733 (1)).

C'est la première fois que Clairaut, tout juste associé (cf. 18 avril 1733 (1)), propose la nomination d'un futur collègue.

Clairaut a certainement voté pour Fontaine, avec lequel il a travaillé sur C. 7 (cf. 10 novembre 1732 (1)), sur la figure de la Terre (cf. 31 mars 1733 (1)) et bientôt sur le calcul intégral (cf. 26 avril 1733 (1)).

Trente ans plus tard, Clairaut se souviendra :
Quant à M. Fontaine, dont vous me demandez aussi quel sujet j'ai d'en être mécontent, après avoir été extrêmement lié avec lui et lui avoir donné de grandes marques d'amitié avant qu'il fut de l'Acad., il n'y a pas été plus tôt entré qu'il n'a cessé de me faire la guerre, et d'une manière souvent malhonnête, mais mon papier finit et sans doute avec votre patience (cf. 28 juillet 1763 (1)).

Clairaut et Fontaine se disputent d'abord sur C. 10 (cf. 30 juin 1734 (1)), ce qui entraînera C. 11 (cf. 26 janvier 1735 (1)), puis C. 14 (cf. 1 février 1738 (1)).

C. 15 résulte également d'une dispute avec Fontaine (cf. 30 avril 1735 (2)).

Clairaut commentera un « problème » de Fontaine le 17 mars 1736 (cf. 17 mars 1736 (1)).

Clairaut sera rapporteur d'un travail de Fontaine sur le calcul intégral (cf. 4 février 1739 (2)), ce qui marquera le début d‘une longue rencontre sur ce sujet, source de C. 25 et C. 28 (cf. 4 mars 1739 (1)).

Ils se disputeront ensuite sur les trajectoires, la participation de Clairaut demeurant inédite (cf. 26 mars 1740 (1)).

Une dispute sur la théorie de la Lune initiée en 1758 (cf. 22 novembre 1758 (1), 23 décembre 1758 (2)) débouchera en 1762 sur (Fontaine des Bertins 62) (cf. 16 janvier 1762 (1), 10 février 1762 (2), 10 février 1762 (2), [c. février] 1762)) et C. 54 (cf. [c. mai] 1762, que ne manquera pas d'Alembert (cf. 5 juillet 1762 (1)), Fontaine remaniant son mémoire (Fontaine des Bertins 64, pp. 393-403) (cf. 20 décembre 1763 (1)).

Ensemble, ils rédigent sept rapports académiques, trois sur des quadratures du cercle (cf. 3 février 1734 (1), 8 février 1736 (2), 6 septembre 1740 (1)), un sur la duplication du cube (cf. 6 septembre 1740 (2)), un sur des asymptotes d'hyperboles (cf. 7 juillet 1742 (1)), un sur la force de la vis (cf. 7 juillet 1742 (2)) et un sur des travaux de Condorcet (cf. 5 décembre 1761 (1)). Ils sont tous négatifs, y compris celui concernant Condorcet, à la soutenance duquel, contrairement à ce qui est souvent dit, ils n'assistent pas (cf. Septembre 1759 (2)).

Clairaut est du comité de librairie qui examine un mémoire de Fontaine sur les principes de la mécanique et de la statique (cf. 3 septembre 1757 (2)).

Fontaine ne semble pas tenir Clairaut en haute estime (cf. 23 mai 1750 (1)), mais l'inverse n'est pas vrai (cf. 10 décembre 1760 (1)).

Il publiera la plupart de ses travaux tardivement (cf. 9 février 1760 (1), 20 décembre 1763 (1)) et hors des volumes académiques (Fontaine des Bertins 64).

Fontaine est notamment étudié dans (Greenberg 81), (Greenberg 82), (Greenberg 84) et (Greenberg 95).

Les 3 et 4 septembre 2004, à Cuiseaux (Saône-et-Loire), s'est tenu un colloque sur Fontaine dont les actes sont encore inédits (Pierre Crépel, CP, 27 juillet 2007).

Selon la Correspondance de Grimm :
[Fontaine] qui vit à la campagne et ne vient à Paris que rarement, passe auprès des connaisseurs pour le premier géomètre du royaume : il met du génie dans ses ouvrages ; et quand on le connaît on n'est pas difficile à persuader sur ce point. C'est un homme d'un tour d'esprit très original et très piquant ; il réunit une finesse extrême à je ne sais quoi de niais. M. l'abbé Nollet lisant un jour à l'Académie une espèce de tarif sur le prix de plusieurs denrées, M. Fontaine, excédé de la longueur du mémoire, dit : « cet homme connaît le prix de tout, excepté du temps. » (Grimm 77-82, vol. 3, p. 467).

Éloge de Fontaine :
Ce fut dans ce temps [mort de son frère aîné et achat d'Anel] que M. Fontaine se lia avec MM. Clairaut et de Maupertuis, et il montra qu'il était digne d'une société si savante, en donnant pour les problèmes de maximis, une méthode plus générale que celle de Jean Bernoulli, dont alors il n'avait pas lu les ouvrages. Cette méthode, imprimée en 1764 […].
[…]
M. Fontaine eut avec plusieurs géomètres de ces disputes toujours surprenantes pour ceux qui ne connaissent de la géométrie que les routes battues [...] ; une avec M. Clairaut, sur les recherches d'une courbe décrite par le sommet d'un angle dont les côtés glissent le long d'une courbe. Jamais M. Fontaine n'attaquait une solution sans donner auparavant une nouvelle solution du même problème, soit pour montrer à chaque fois qu'il était digne de son adversaire, soit plutôt que son génie, vraiment original, n'eut pu sans cela entendre le travail d'un autre ; il faut avouer que dans la dispute il s'écartait quelques fois de cette politesse d'usage dont jamais il n'est permis de se dispenser, mais que M: Fontaine croyait peut-être moins nécessaire avec des adversaires illustres, et dont la gloire n'avait pas besoin de ces petits ménagements.
[…]
Mené par M. de Maupertuis dans ces société de gens oisifs qu'on appelle le monde [...] (Condorcet 71).

Lalande :
Euler avait une si grande idée du génie de Fontaine, d'après ses premiers mémoires, qu'il me disait en 1751 : « S'il se fait quelque découverte à laquelle nous ne nous attendons pas, je crois que c'est Fontaine qui la fera » ; mais il ne suivit pas longtemps cette belle carrière ; il se retira à la campagne, et l'on y a pas d'émulation, qui seule enfante les grandes choses (Montucla 99-02, vol. 4, p. 77).

Autre version :
[L'éloge de Fontaine] est dans l'Histoire de l'Académie de cette année [1771], et ce fut le premier que fit Condorcet ; mais livré sans réserve à d'Alembert, il ne dit pas de Fontaine ce qu'il aurait pu en dire : je puis y ajouter un trait. Euler me disait à Berlin en 1751 : « S'il y a quelque chose à trouver dont nous n'avons aucune idée, c'est de Fontaine que nous l'aurons. » On sera étonné, après cela, de ce qu'il ne savait pas ce que c'était que l'équateur et le méridien. Lorsqu'en 1734 on disputait à l'Académie sur la figure de la Terre, en sortant de l'Académie il emmena aux Tuileries un de ses confrères qui le lui expliqua sur le sable. Fontaine lui dit alors : « Si ce n'est que cela, vous ne traitez depuis un mois que de questions d'écoliers. » Son génie analytique lui faisait voir tout d'un coup au-delà du problème en question (Lalande 03, p. 486) (Guy Boistel, CP, 13 décembre 1998).

Delambre :
Un géomètre français [Fontaine], qui réunissait à beaucoup de sagacité un amour-propre propre plus grand encore, et ne se donnait guère la peine d'étudier les ouvrages des autres, accusa M. Lagrange de s'être égaré dans la nouvelle route qu'il avait tracée, faute d'en avoir bien entendu la théorie [cf. HARS 1767, et Lagrange 67-92, vol. 2, p. 38] ; il lui reprochait de s'être trompé dans ses assertions et ses calculs. Lagrange, dans sa réponse, montre quelque étonnement de ces expressions peu obligeantes, auxquelles il était si peu accoutumé ; il s'attendait au moins à les voir motivées sur quelques raisons bonnes ou mauvaises. Mais il n'en trouvait d'aucun genre. Il fait voir que la solution proposée par Fontaine était incomplète et illusoire à certains égards. Fontaine s'était vanté d'avoir appris aux géomètres les conditions qui rendent possible l'intégration des équations différentielles à trois variables ; Lagrange lui fait voir, par plusieurs citations, que ces conditions étaient connues des géomètres longtemps avant que Fontaine fut en état de les enseigner (Lagrange 67-92, vol. 1, p. xxix).
Abréviations
Références
  • Condorcet (Jean-Antoine-Nicolas de Caritat, marquis de), « Éloge de M. Fontaine », HARS 1771, Hist., pp. 105-116 [Télécharger].
  • Fontaine des Bertins (Alexis), « Doutes sur la méthode de M. Clairaut pour déterminer le mouvement de la Lune autour de la Terre », Journal des sçavans, (février 1762) 111-115 [Télécharger] [22 novembre 1758 (1)] [Plus].
  • Fontaine des Bertins (Alexis), Mémoires donnés à l'Académie royale des sciences, non imprimés dans leur temps, Paris, 1764 [Télécharger] [17 juin 1733 (1)] [Plus].
  • Greenberg (John L.), « Alexis Fontaine's 'fluxio-differential method' and the origins of the calculous of several variables », Annals of Science, 38 (1981) 251-290.
  • Greenberg (John L.), « Alexis Fontaine's integration of ordinary differential equations and the origins of the calculous of several variables », Annals of Science, 39 (1982) 1-36.
  • Greenberg (John L.), « Alexis Fontaine's route to the calculous of several variables », Historia Mathematica, 11 (1984) 22-38.
  • Greenberg (John L.), The problem of the Earth's shape from Newton to Clairaut, New-York, 1995 [Novembre 1728 (1)] [Plus].
  • Grimm (Adam Frédéric Melchior, baron de), Correspondance littéraire, philosophique et critique par Grimm, Diderot, Raynal, Meister etc...,, éd. M. Tourneux, 16 vol., Paris, 1877-1882 [Chronologie SA] [Maupertuis] [Plus].
  • Lagrange (Joseph-Louis, comte de), Œuvres, 14 vol., éd. J.-A. Serret, Paris, 1867-1892 [30 juin 1734 (1)] [Plus].
  • Lalande (Joseph Jérôme Le François de), Bibliographie astronomique avec l'histoire de l'astronomie depuis 1781 jusqu'à 1802, Paris, 1803 [Télécharger] [21 août 1737 (2)] [Plus].
  • Montucla (Jean-Étienne), Lalande (Joseph Jérôme Le François), Histoire des mathématiques, nouv. éd., 4 vol., Paris, 1799-1802 [(1 juillet) 20 juin [1731]] [Plus].
Courcelle (Olivier), « 29 avril 1733 (1) : Clairaut vote », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n29avril1733po1pf.html [Notice publiée le 11 août 2007, mise à jour le 25 avril 2011].