Alexis Clairaut (1713-1765)

Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765)


(1 juillet) 20 juin [1731] : Voltaire (Fakener, près de Canterbury) écrit au Nouvelliste du Parnasse :
J'ai entendu dire souvent en France que tout est dégénéré, et qu'il y a en tout genre une disette d'hommes étonnante. Les étrangers n'entendent à Paris que ces discours, et ils nous croient aisément sur notre parole ; cependant quel est le siècle, où l'esprit humain ait fait le plus de progrès que parmi nous ? Voici un jeune homme de seize ans qui exécute en effet ce qu'on a dit autrefois de M. Pascal, et qui donne un traité sur les courbes [C. 1], qui ferait honneur aux plus grands géomètres (D 415).
La lettre de Voltaire sera reproduite dans le Nouvelliste du Parnasse (lettre 26, tome 2, p. 234), avec une note citant nommément Clairaut, et rééditée dans le Mercure de France (juillet 1731, pp. 1722-1735).

Contrairement aux apparences, Voltaire est en France :
[Voltaire] va jusqu'à faire courir le bruit qu'il est en Angleterre. Écrivant au Nouvelliste du Parnasse, il date de « Fakener, près de Canterbury » : pour le village où il est censé résider il a pris le nom de son ami Fawkener ; il pousse la mise en scène jusqu'à indiquer la date d'après l'old style des anglais (Pomeau 88, p. 275).

Il est difficile de dater la première rencontre de Clairaut avec Voltaire : en 1729, Voltaire s'était enrichi grâce à La Condamine (Pomeau 88, pp. 259-260) qui fut membre de la Société des arts avant de devenir académicien le 12 décembre 1730 ; à partir de la fin 1731, la baronne de Fontaine-Martel, qui loge Voltaire, tient une sorte d'académie à laquelle se rend parfois le comte de Clermont, protecteur de la Société des arts (Pomeau 88, p. 282) ; Voltaire est en rapport avec Maupertuis à partir d'octobre 1732 (D 533) ; la première trace directe de Clairaut dans l'entourage de Voltaire de trouve dans une lettre de la marquise du Châtelet de [mars 1734] (cf. [24 mars 1734]).

Voltaire citera Clairaut dans ses Lettres anglaises (cf. 16 juillet 1729 (1)), dans son Épître à Madame la marquise du Châtelet (cf. 27 janvier 1736 (1)), dans son Éloge historique de Madame du Chastelet et ses Mémoires pour servir à la vie de M. de Voltaire, écrits par lui-même (cf. 20 décembre 1745 (1)), dans son Dictionnaire philosophique (cf. Sans date (4), 31 août 1740 (1)), implicitement dans Micromégas (cf. 13 juin 1737 (1)).

Il a peut-être bénéficié des leçons de C. 21 qu'il recommande à Frédéric plus d'une année avant qu'il ne soit achevé (cf. [c. 20 novembre 1739]), qu'il reçoit de Clairaut (cf. [c. 15 septembre 1741]), qu'il recommande également à La Chalotais (cf. 28 février [1763]), dont il commande un autre exemplaire à d'Alembert (cf. 21 mars 1768 (1), 1 avril [1768]), et qu'il évoque dans son Dictionnaire philosophique et dans ses Questions sur l'encyclopédie (cf. 31 août 1740 (1))…

Voltaire citera Clairaut dans des vers de sa Réponse à Mlle de Malcrais (cf. 15 août 1732 (1)), de son Épître à Algarotti (cf. [c. 7 octobre 1735]) et de ses Discours en vers sur l'Homme (cf. [c. octobre 1735]), implicitement dans son Ode VIII à MM de l'Académie des sciences (Voltaire 29-34, vol. 12, p. 430) et dans son Dialogue d'un parisien et d'un Russe (Voltaire 29-34, vol. 14, p. 179-180)…

Clairaut placera des vers de Voltaire en tête de C. 51 (cf. 8 août 1759 (1)).

Des vers sur Voltaire ont été attribués à Clairaut (cf. [c. avril] 1766 (2)], [c. juin] 1766 (2), 1768 (3)) mais ils sont de Pierre Clément (cf. 3 octobre 1739 (1)).

Avec ses collègues commissaires du prix de l'Académie pour 1736, Clairaut choisira le thème du prix pour 1738 « La nature du feu, et sa propagation » qui connaîtra la participation de Voltaire (cf. 6 septembre 1735 (1)).

Clairaut sera un rapporteur modérément enthousiaste du mémoire sur les forces vives (cf. 15 avril 1741 (1), 26 avril 1741 (1), 27 avril 1741 (1)), ce qui mécontente peut-être Voltaire ([? mai 1741], 28 mai 1741 (1), 1 juillet 1741 (2)).

Clairaut aurait conseillé à Voltaire de se détourner des sciences (cf. 26 avril 1741 (1)).

Clairaut a aussi été nommé rapporteur d'une nouvelle édition des Éléments de la philosophie de Newton, mais le rapport ne semble jamais avoir été remis à l'Académie (cf. 4 juin 1760 (1)).

Voltaire est un témoin irremplaçable de l'activité de la marquise du Châtelet, et de la part que prit Clairaut à l'élaboration de C. 50 (cf. 20 décembre 1745 (1), [? 12 octobre 1749], [c. 1 janvier 1766]).

Il aurait été jaloux en raison de la liaison supposée de Clairaut et de la marquise du Châtelet (cf. 21 [mai 1749] (2)), mais Clairaut a souvent été confondu avec Maupertuis (cf. 24 mars [1739]). Si Clairaut a bien été invité à Cirey, rien n'indique qu'il y soit allé au moins une fois (cf. 23 octobre 1734 (1)).

Clairaut et Voltaire apparaissent ensemble dans plusieurs romans (cf. 1873 (1), 1927 (1)).

Voltaire est un visiteur recensé du Mont Valérien (cf. [13 mai 1735]). Il fait plusieurs fois part de son admiration pour Clairaut (cf. ([c. 10 janvier 1738], 22 mai [1738]) qui apparaît régulièrement dans sa correspondance (cf. 4 février 1738 (1), 11 septembre 1738 (1), 20 décembre [1738], 27 mai [1765], 28 mai 1765 (1), 3 mars [1766], 29 janvier 1776 (1)).

De son côté, Clairaut ne manque pas de le saluer quand il écrit à la marquise du Châtelet (cf. 4 janvier [1741]), à Euler (cf. 24 juillet 1750 (1)), et lui recommande Courtivron (cf. 2 janvier [1753]).

Clairaut soupe avec Voltaire et la marquise du Châtelet en juillet 1747 (cf. 3 juillet 1747 (1), 19 juillet 1747 (1)).

De la correspondance directe entre les deux hommes, il ne reste que deux lettres, celle de Clairaut du 16 août 1759 à laquelle est joint C. 48 (cf. 16 août 1759 (1)), et la réponse de Voltaire du 27 août (cf. 27 août 1759 (1)).

Montucla :
Voltaire qui voulut orner la philosophie de Newton par les grâces d'un style qui était capable de la faire rechercher, s'en expliquait ainsi en 1738, écrivant même de concert avec l'un de nos plus habiles géomètres, (Clairaut) et presque sous ses yeux. « M. Cassini, dit-il, a trouvé que presque tous ces corps passagers ont une route différente de celles des planètes. On a ignoré jusqu'ici de quelle conséquence sont ce nouveau zodiaque et ce retour périodique des comètes pour la conservation du genre humain. Imaginez-vous, par exemple, que ce sont des corps fortuits qui se trouvent par hasard dans notre écliptique ; quel désastre ne serait-ce pas pour notre Terre, si malheureusement elle venait à se trouver au même point ? L'idée de deux bombes qui crèveraient en se choquant en l'air, est infiniment au-dessous de celle qu'on doit en avoir. Heureusement pour nous on a découvert que le plupart des comètes, dans les noeuds de leurs orbites, sont bien moins éloignées du Soleil que ne sont notre Terre, Vénus et Mercure ; c'est ce qui toute notre sûreté, et qui nous fait connaître combien nous avons de grâces à rendre à Dieu pour un si grand bienfait ». Élémens de la philosophie de Newton, 1738, p. 381 (Montucla 99-02, vol. 4, p. 262).
Abréviations
  • C. 1 : Clairaut (Alexis-Claude), Recherches sur les courbes à double courbure, Paris, Nyon, Didot et Quillau, 1731, in-4°, VIII-122p., 67 fig. en 6 pl [Télécharger] [16 juillet 1729 (1)] [13 avril 1726 (1)] [Sans date (18)] [Plus].
  • C. 21 : Clairaut (Alexis-Claude), Elemens de geometrie, Paris, David fils, 1741, in-8°, XXIV-XVI-216 p., 14 pl [31 août 1740 (1)] [18 avril 1736 (2)] [Plus].
  • C. 48 : « Mémoire sur la comète de 1682, adressé à MM. les auteurs du Journal des sçavans », Journal des sçavans, janvier 1759, pp. 38-45 [Télécharger] [15 novembre 1758 (1)] [19 novembre 1755 (1)] [Plus].
  • C. 50 : Newton (Isaac), Principes mathématiques de la philosophie naturelle, par feue Madame la marquise du Châtelet, G.-É. du Châtelet trad. et éd., A. Clairaut éd., Paris, Lambert, 1759, 2 vol., in-4° (iv)-xviii(vi)-437 p., 9 pl. ; (iv)-180-299 p., 5 pl [20 décembre 1745 (1)] [[? juillet 1734]] [Plus].
  • C. 51 : Clairaut (Alexis-Claude), Théorie du mouvement des comètes, dans lesquelles on a égard aux altérations que leurs orbites éprouvent par l'action des planètes. Avec l'application de cette théorie à la comète qui a été observée dans les années 1534, 1607, 1682 et 1759, Paris, Michel Lambert, s. d. [1760] [Télécharger] [8 août 1759 (1)] [6 avril 1743 (1)] [Plus].
Références
  • Montucla (Jean-Étienne), Lalande (Joseph Jérôme Le François), Histoire des mathématiques, nouv. éd., 4 vol., Paris, 1799-1802 [29 avril 1733 (1)] [Plus].
  • Pomeau (René), Voltaire en son temps. D'Arouet à Voltaire, Oxford, 1988.
  • Voltaire (François Marie Arouet, dit), Œuvres de Voltaire, éd. A.J.Q. Beuchot, 70 vol., Paris, 1829-1834 [Sans date (4)] [Plus].
  • Voltaire (François Marie Arouet, dit), The Complete Works of Voltaire, 13? vol., Th. Besterman et al. Eds, Genève-Oxford, 1968- [Chronologie SA] [Plus].
Courcelle (Olivier), « (1 juillet) 20 juin [1731] : Voltaire (Fakener, près de Canterbury) écrit au Nouvelliste du Parnasse », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/npo1juilletpf20juinco1731cf.html [Notice publiée le 31 juillet 2007, mise à jour le 2 mai 2010].