Alexis Clairaut (1713-1765)

Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765)


9 janvier 1752 (1) : Clairaut (Paris) écrit à Euler :
Monsieur,

Je n'entreprendrai point de me disculper entièrement du silence que j'ai gardé avec vous depuis si longtemps. Quelque chose que je pusse vous dire, je serais obligé d'avouer beaucoup de paresse. Il est vrai que cette paresse a été si générale qu'elle ne doit pas signifier la moindre altération dans mes sentiments pour un homme qui m'a inspiré une aussi grande estime que vous. Mais seulement un engourdissement d'âme dont tous les objets se sont ressentis. Je n'ai donc, puisqu'il faut l'avouer, rien fait depuis que je ne vous ai écrit, que perdre mon temps d'une manière indigne d'un philosophe et d'un homme en correspondance avec le savant dont l'esprit est le plus actif et le plus fertile. Ce n'est que depuis que les pièces sur la question de Saturne m'ont été remises que j'ai senti finir ma léthargie [cf. 4 septembre 1751 (2)]. Il y en a particulièrement une et je suis bien aise de vous dire que c'est la seule sur laquelle les juges puissent s'arrêter, qui m'aurait entièrement remis au travail si des occupations d'une autre nature ne m'éloignaient entièrement de ces matières pour le présent. La pièce dont je vous parle [(Euler 69b)] m'a fait beaucoup de plaisir par la quantité de belles ressources d'analyse que l'auteur y a employées, entre lesquelles l'idée d'avoir recours à une espèce nouvelle d'anomalie dépendante de l'élongation des deux astres est une des plus heureuses que je connaisse en ce genre.

J'ai communiqué à MM. de Mairan, du Hamel et de La Condamine tout ce que vous m'avez dit d'obligeant en leur faveur [cf. 26 octobre 1751 (1)], et ils y ont étés fort sensibles. L'ouvrage de M. du Hamel sur la même matière que le vôtre va paraître incessamment [(Duhamel du Monceau 52), cf. 6 mars 1751 (1), 5 février 1752 (1)]. Je ne crois pas que vous y reconnaissiez beaucoup de choses qu'il ait pu tirer de vous, parce que la grande théorie semée dans votre livre [(Euler 49a)] n'est ni de son ressort, ni de son but, ne s'étant occupé que de la partie purement pratique. M. Bouguer va publier un autre ouvrage de navigation pratique aussi [(Bouguer 53)]. Mais je crois que ce n'est que la partie qui regarde le pilotage à laquelle il a pensé. Et c'est un ouvrage élémentaire fait par ordre du ministère pour l'usage des jeunes marins.

J'ai reçu la somme du prix de Pétersbourg avec la nouvelle qu'on allait imprimer ma pièce [C. 39] incessamment. J'ai envoyé [cf. 2 janvier 1752 (1)] à l'instigation de M. Schumacher une petite addition qui contient à peu près ce que je vous ai mandé il y a quelque temps [cf. 5 août 1751 (1), 26 septembre 1751 (1)], c'est-à-dire de petits changements dans quelques unes de mes équations. J'y ai mis de plus une comparaison des mêmes observations avec ces changements. Il me tarde infiniment de voir le mémoire que vous avez envoyé à l'Académie de Pétersbourg sur la même matière que ma pièce [(Euler 53)]. C'est une impatience que j'ai toujours pour tous vos ouvrages et qui ne cède qu'à l'envie que j'aurais de vous prouver l'attachement avec lequel j'ai l'honneur d'être, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur Clairaut.

Paris, 9 janv[ier] 1752 (O IVA, 5, pp. 218-219).
La réponse d'Euler est perdue.

Clairaut réécrit à Euler le 4 avril (cf. 4 avril 1752 (1)).
Abréviation
Références
Courcelle (Olivier), « 9 janvier 1752 (1) : Clairaut (Paris) écrit à Euler », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n9janvier1752po1pf.html [Notice publiée le 13 novembre 2010].